Mireille COMMANDRE



Mireille CommandreMireille Commandré nous a quittés le 11 juillet 2017.

Texte lu pour l'Institut Fresnel par Claude Amra :
"Nous avons connu Mireille dans un cadre professionnel, même si ses yeux brillaient toujours d’amour et d’admiration quand elle nous parlait de son LAURENT. C’est vrai qu’ils étaient alors un jeune couple moderne et pétillant de la bonne ambition, de celle qui crée des richesses pour le pays. Mireille était une femme de gauche, une femme qui savait donner sans recevoir, qui savait réconforter, avec une générosité abondante. Elle a été de tous les combats positifs, des combats qui ont pour ambition que chacun trouve sa place, sa légitimité, avec équité et pertinence. C’est dans cet esprit qu’elle a construit avec nous un grand laboratoire de recherche, dont elle a été un acteur majeur, parce qu’elle savait convaincre et redonner confiance à chacun dans une ambition commune. Mireille a été un artisan majeur dans la construction de l’Institut Fresnel. Elle l’a créé avec nous et souvent devant nous, il y a 17 ans, avant que l’Institut n’acquière sa notoriété internationale. Nous étions partis de toutes petites équipes, ce qui était peu de choses en région, mais on savait que l’on pouvait s’appuyer sur le charisme de Mireille pour décrocher l’« indécrochable ». Le tempérament et la loyauté de Mireille ont été une clé de voûte pour obtenir les bâtiments dans lesquels nous exerçons aujourd’hui notre recherche, ceci dans un contexte difficile où il fallait faire montre de courage dans nombre de réunions publiques où sa carrière pouvait être mise en cause. Sur ce point, Mireille n’a jamais cédé, ni aux menaces, ni au clientélisme, ni aux promesses particulières. Ça lui était tout simplement impossible, parce qu’elle ne savait que défendre l’intérêt général, et la fonction publique qui lui était chère. Oui, Mireille dégageait quelque chose d’immatériel qui donnait envie de croire ensemble, et sans elle nous n’aurions pas réussi à installer la confiance indispensable à ce grand projet qu’était l’Institut Fresnel. Mireille débordait d’énergie ; elle ne s’est donc pas arrêtée là, elle est aussi devenue l’artisan d’une grande école d’ingénieur, l’Ecole Centrale Marseille qui fait désormais notre fierté en Région et sur la scène nationale. Là non plus, ça n’a pas été facile, et nous croyons savoir combien de sacrifices Mireille a consenti, sur sa recherche et sa vie personnelle, pour que ce projet aboutisse. On peut dire que rares sont nos collègues qui ont eu la chance de porter de si belles créations, à la fois en enseignement et recherche, et d’en voir la concrétisation au bénéfice de tous. Nous tous, personnels de l’université et des organismes de recherche, mais aussi amoureux de notre région et impliqués dans son rayonnement, sommes reconnaissants à Mireille pour ces réalisations. Malgré cette réussite exceptionnelle, quelquefois Mireille doutait d’elle-même, mais c’était le prix à payer, le prix d’un épuisement qui faisait suite au réconfort qu’elle prodiguait sans retenue, à chacun. Qui n’a pas été soutenu par Mireille, n’a pas été aidé moralement ou matériellement, au niveau personnel ou professionnel ? Quelquefois cette grande humanité pouvait être raillée, tant elle dénotait dans un cadre professionnel ; mais nous étions très nombreux à savoir qu’il y avait là une grandeur et un courage qui forçaient le respect. Mireille a aussi défendu la condition des femmes au travail, en même temps qu’une équité pour tous les personnels ; car la politique faisait partie du quotidien pour Mireille, et l’on parle ici de cette politique qui permet de mieux vivre ensemble. Nous avons souvent vu Mireille épuisée par tous les combats qu’elle portait tout en préparant perpétuellement de nouveaux cours pour ses étudiants, le week-end et les vacances, avant de partir en conférence à travers le monde, puis revenir pour être notre porte-parole auprès des établissements et des collectivités, obtenir des postes et des promotions pour les plus jeunes, et des financements pour ses collègues… Mireille n’arrêtait jamais, et l’on peut imaginer que cette implication effrénée dans la fonction publique l’aura privée de quelques années supplémentaires auprès de sa famille. Sois certain, Laurent, que Mireille était aussi profondément aimée sur la scène internationale. Nous savons qu’actuellement ils sont déjà nombreux à lui rendre hommage aux Etats-Unis, au Canada, en Chine, en Allemagne, au Royaume Uni, au Brésil... Mireille avait porté son équipe de recherche au plus haut niveau international, et ses travaux ont permis d’accroître considérablement la quantité d’énergie que l’on peut transporter avec des faisceaux de lumière confinés dans des impulsions temporelles. Grâce à ses résultats, notre laboratoire a pu accéder à une place de premier plan auprès du CEA, avec l’université et le CNRS, dans le cadre de ce grand projet du laser MEGAJOULE qui pourrait fournir l’énergie de demain. Nous avons reçu un message du responsable de programme américain, annonçant : « j’ai rencontré Mireille pour la première fois en 1994 lors d’une conférence à Grenoble. Elle m’a considérablement influencé dans ma façon d’appréhender les techniques de microscopie photo-thermique pour analyser en profondeur les endommagements provoqués par les lasers de puissance sur la matière inerte. J’ai toujours eu la plus grande considération pour le travail de Mireille et c’est pourquoi j’ai recommandé très vite qu’elle fasse partie du comité de programme de l’unique congrès international du domaine qui se déroule chaque année au Colorado ». Un autre message émanant de collègues d’une vingtaine de pays, disait : « Nous connaissions Mireille comme quelqu’un de vigoureux et d’enthousiaste. Au-delà des 200 articles qu’elle avait publiés, chacun se souvient combien elle était énergique et enthousiaste, et avec quelle rapidité elle pouvait parler ou penser. A côté d’elle, on se sentait toujours envahi d’une grande énergie. » Sur d’autres aspects, moins professionnels mais tout aussi majeurs dans l’altérité, chacun se souviendra de la convivialité et de l’originalité de Mireille, qui plaisantait toujours sans jamais boire une goutte d’alcool, et dont les cheveux prenaient souvent une couleur inattendue (elle a été brune, blonde, rousse), et chaque fois elle portait ces couleurs avec une élégance remarquée. Voilà donc, Laurent, les quelques mots que nous voulions te dire pour tout l’Institut Fresnel, des mots qui pourront rappeler à vos enfants, Benjamin, Emmanuel, que Mireille était une grande DAME. Enfin, à titre plus personnel, nous avons beaucoup aimé la personne de Mireille pendant ces 30 années d’exercice commun, où elle n’a JAMAIS failli. Toujours fidèle en amitié, toujours loyale dans le travail, Mireille n’a jamais proféré un mensonge, n’a jamais manipulé, n’a jamais envié. Elle était profondément heureuse quand d’autres réussissaient, et on pouvait lui accorder une confiance aveugle. Il y avait de tout ça dans Mireille, un EXEMPLE à suivre. Il y a une semaine, elle nous disait encore, sous couvert d’une grande simplicité : « comprenez que vous avez de la chance de vivre dans un pays en paix, de faire vos courses dans un quartier où l’on vous connaît, d’exercer un métier que vous avez choisi ». Elle voulait certainement ici nous laisser un dernier message de sagesse. Avant de conclure, Laurent, nous voulons te dire encore une fois que pendant toutes ces années, les yeux de Mireille n’ont jamais cessé de briller quand elle parlait de Benjamin, d’Emmanuel et de LAURENT. Bises à toi, à tes enfants, à Mireille. La vie continue avec vous"

Mireille au milieu de son équipe en 2013
Mireille Commandre


Mireille à Boulder en septembre 2004
Mireille Commandre
Mireille et Detlev Ristau du Laser Center de Hanovre
Mireille Commandre